Il était une fois, dans la grande savane de Ndoumbelane, un chien sans chaîne, sans honneur, mais rusé. Le peuple des animaux, lassé des rugissements lointains des lions et des promesses non tenues des éléphants, décida un jour — par désespoir — de donner à ce chien l’os du pouvoir. Un os que tant avaient convoité, corrompu, voire souillé. Mais cette fois, on crut que ce chien, parce qu’il venait du peuple et avait connu la faim, serait différent. Erreur funeste !
A peine le chien s’était-il vu confier la mangeoire de la contrée qu’il oublia la misère qui l’avait nourri. Il n’aboya plus pour alerter, mais pour dominer. Il ne mordit pas l’injustice, mais ceux qui osaient lui rappeler ses promesses. Aveuglé par son nouveau trône, il déchiqueta même la main qui lui avait donné l’os : celle du peuple des animaux.
Alors qu’à Ndoumbelane, le peuple des animaux attendait un bâtisseur, il eut un aboyeur. Il espérait un pacificateur, il reçut un diviseur. Là où il fallait planter les graines de la paix, le chien-grandeur creusa des fosses d’intimidation. Là où il fallait rassembler les habitants de Ndoumbelane, il dressa des barrières de races et d’espèces, et encouragea le clientélisme et le culte de sa propre personnalité. Le pouvoir devint un os qu’il rongeait seul, dans l’ombre, tandis que les autres animaux affamés se contentaient des miettes et des cris en chœur.
Mais le plus tragique n’est pas tant dans l’attitude du roi-chien que dans l’oubli du peuple des animaux : ce n’est pas parce que l’on a souffert qu’on sait gouverner. Ce n’est pas parce qu’on vient d’en bas qu’on a nécessairement le cœur en haut. Le pouvoir, sans éthique, sans vision, sans culture de la paix, n’est qu’un collier d’or au cou d’un chien enragé.
Ndoumbelane saigne aujourd’hui non pas parce qu’elle manque de ressources, de talents ou d’histoire. Elle saigne parce qu’elle a confié sa destinée à des aboyeurs plutôt qu’à des penseurs. À des mordeurs de pouvoir, plutôt qu’à des bâtisseurs d’avenir. N’a-t-il pas raison celui qui avait dit que : « la critique est aisée, mais l’art est difficile ? »
L’heure est venue de repenser le pacte démocratique à Ndoumbelane. De ne plus confondre la rage avec le courage, ni le vacarme avec la vision. De retrouver, en tant que peuple de Ndoumbelane, la lucidité de distinguer entre celui qui protège la bergerie et celui qui veut juste s’en repaître.
Car il est temps, pour cette contrée [Ndoumbelane], de ne plus se contenter de chiens de garde comme dirigeants, mais de choisir des bergers. Ceux qui, au lieu de mordre, guérissent. Ceux qui, au lieu de diviser, unissent. Ceux qui, au lieu d’aboyer, bâtissent en silence mais avec grandeur.
Ndoumbelane mérite mieux qu’un règne de chiens. Elle mérite une ère de conscience
Jeef MWINGAMB.