Kinshasa — Le général Sikatenda Shabani, figure emblématique de la lutte armée menée par Mzee Laurent-Désiré Kabila, est décédé dans la matinée du 4 juin 2025 en détention à Kinshasa. Ancien compagnon de la Révolution, militaire de haut rang, il s’est éteint dans des conditions encore opaques, loin des projecteurs et des hommages qu’il aurait pu espérer.
Un vétéran de la révolution oublié
Natif du Sud-Kivu, Sikatenda fut l’un des proches les plus fidèles de Mzee Laurent-Désiré Kabila. Dès les années 1970, il faisait partie du noyau restreint qui gravitait autour du « Pic de la Révolution » dans la forêt de Kisengela, un sanctuaire stratégique du maquis kabiliste.
Lors de l’offensive de l’AFDL en 1996, il joue un rôle crucial dans les négociations avec les communautés locales, notamment les baBembe, aux côtés du général Lwecha. Ces tractations permettront aux troupes rebelles de franchir des zones-clés vers Kalemie, précipitant la chute du régime Mobutu.
Premier commandant de la DEMIAP
Après la prise de Kinshasa en mai 1997, Mzee Kabila met en place la DEMIAP (Détection Militaire des Activités Anti-Patrie), destinée à remplacer le défunt SARM. Le général Sikatenda en est nommé commandant en chef, une fonction sensible qu’il occupera jusqu’à la guerre du RCD en 1998. Il sera ensuite chargé de coordonner les mouvements Maï-Maï dans l’est du pays jusqu’en 2002.
Durant la transition 1+4 (2003–2006), il rejoint l’État-major général des FARDC, où il servira jusqu’à sa mise à la retraite entre 2012 et 2013.
Une fin dans l’ombre
Arrêté en novembre 2024 sans communication officielle sur les motifs de son interpellation, le général Sikatenda partageait le sort d’autres officiers FARDC mis en détention ces dernières années, souvent sans procès ni déclaration publique des autorités. Il avait été incarcéré aux côtés du général Mutepeke. Les raisons exactes de leur détention n’ont jamais été communiquées par les services de sûreté nationale.
C’est dans une cellule de Kinshasa qu’il a rendu l’âme, à 74 ans environ, dans une quasi-indifférence institutionnelle.
Une série noire qui interroge
La mort de Sikatenda s’ajoute à une liste croissante d’officiers FARDC décédés en détention ou en situation de mise à l’écart sans explication, phénomène de plus en plus critiqué par les ONG de défense des droits humains et certains parlementaires.
Alors que la mémoire de la lutte armée reste vivace dans certaines régions du pays, la disparition de ces anciens compagnons de Mzee Kabila, sans hommage officiel, soulève de nombreuses interrogations sur la gestion sécuritaire et judiciaire des figures militaires du passé.
» J’ai appris, avec peine, la mort du Lieutenant-Général Sikatenda Shabani. Je salue la mémoire de ce haut officier à la retraite, compagnon de lutte de Mzee Laurent Désiré Kabila, âgé de 83 ans qui m’a vu naître et m’a porté. Il a été arrêté et mis en détention depuis novembre 2023, sans procès jusqu’à succomber à la suite de mauvais traitements. Il fait désormais partie de nombreuses victimes de l’intolérance et de la tyrannie. Je présente mes condoléances à la famille de l’illustre disparu, aux compagnons de lutte de Mzee Laurent Désiré Kabila, aux armes de la RDC, aux FARDC et à toute la communauté Bembé. Paix et repos éternels à l’âme du Général « , a écrit, ce mercredi 4 juin, Joseph Kabila depuis Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu. »
Mutaka Yote
«
Mutaka Yote