A l’heure où l’Université de Lubumbashi célèbre son 70ème anniversaire, les festivités prévues peinent à masquer une réalité plus sombre : crise de gouvernance, tensions internes, finances opaques et frustration généralisée du personnel. Dans cette tribune, un observateur engagé décrypte le malaise profond d’une institution à la croisée des chemins.
Soixante-dix ans. Sept décennies d’histoire, de luttes, de prestige et d’engagement scientifique pour le pays. L’Université de Lubumbashi aurait dû fêter cet anniversaire dans la dignité et la grandeur. Mais hélas, le jubilé prévu en grande pompe se déroule sur fond de crise profonde, de frustrations collectives et de gouvernance autoritaire. Le symbole est fort, mais tragique : l’UNILU ne célèbre pas seulement ses 70 ans, elle expose aussi ses plaies.
Au cœur de cette crise, un homme cristallise les tensions : le recteur Gilbert Kushiba. Porté à la tête de l’institution dans l’espoir d’un souffle nouveau, il est aujourd’hui accusé de dérive solitaire, d’opacité dans la gestion, et d’une administration verrouillée à double tour. Les décisions sont prises en cercle restreint, les organes de concertation marginalisés, et les voix critiques réduites au silence. Une université n’est pourtant pas une entreprise, encore moins une propriété privée.
Les finances de l’institution, censées servir à la promotion académique, à l’amélioration des conditions d’enseignement et au bien-être du personnel, sont désormais au cœur d’un scandale feutré. Selon plusieurs sources, Kinshasa serait devenue la plaque tournante des faveurs et des deals opaques pour assurer le maintien du recteur, au détriment de ceux qui font tourner la machine sur le terrain. Pendant ce temps, les enseignants, les administratifs et les ouvriers n’ont perçu qu’un tiers de la prime pourtant promise depuis des mois. L’année académique touche à sa fin, les caisses sont vides, mais les discours sont pleins.
Plus inquiétant encore : la désintégration progressive du syndicat, jadis vigie de la communauté universitaire. Aujourd’hui, il est divisé, infiltré, parfois manipulé, et plus souvent encore paralysé par des ambitions personnelles. Il n’y a plus de contre-pouvoir interne crédible. Et sans contre-pouvoir, toute institution glisse vers l’arbitraire.
La question qui se pose, au-delà du scandale en cours, est simple : quelle université voulons-nous pour demain ? Si l’UNILU a pu former tant d’élites, tant de cadres et tant d’esprits libres dans des contextes parfois plus rudes encore, comment en est-elle arrivée là ? L’absence de réforme structurelle, la politisation de la gouvernance, le mépris des valeurs académiques et le clientélisme ambiant sont devenus la norme.
Le jubilé aurait dû être un temps d’introspection, de refondation. Il se transforme en un miroir cruel tendu à toute la société congolaise : une célébration de façade pour une institution qui vacille, minée par ses propres contradictions.
Il est encore temps de redresser la barre. Mais cela exige du courage. Celui de rétablir la transparence, de réconcilier la communauté universitaire avec elle-même, de restituer la parole aux véritables acteurs du savoir, et de rompre avec les logiques de cour et de favoritisme. Car l’UNILU, avec son histoire, son potentiel et sa place centrale dans l’écosystème intellectuel du pays, mérite mieux qu’un jubilé sous perfusion. Pour la prochaine édition, des révélations à vous couper le souffle sur la gestion jugée chaotique par certains observateurs en interne du système ‘’Fitula’’.
Affaire à suivre !
Gabriel Wakunonda