Paradoxal, ce pouvoir congolais. Il appelle à la paix, mais muselle la contradiction. Il convoque les Églises pour parler de dialogue national, mais leur sert un monologue soigneusement verrouillé. La rencontre du 21 juin entre le président Félix Tshisekedi et les représentants des Églises catholique et protestante avait tout pour être un tournant. Elle n’aura été qu’une déclaration de principes flanquée d’une liste noire.
La vérité est crue mais simple : le président ne veut pas d’un vrai dialogue, mais d’un huis clos entre convaincus. Un dialogue sans Fayulu, sans Matata, sans Kamerhe, sans Katumbi, sans Naanga, sans Kabila ou ses fidèles, sans les têtes brûlées de la société civile… Bref, un dialogue sans le pays réel, mais avec quelques figures lisses du consensus.
Or un dialogue sans ses adversaires, c’est une messe sans pécheurs, un rituel de purification sans saleté à laver. Et donc, une farce. A quoi aura servi une rencontré de 2 heures que l’on a voulu gardé secrète ?
L’Église à l’épreuve du pouvoir
Les Églises congolaises, surtout la CENCO et l’ECC, entrent en terrain glissant. Elles veulent rassembler, mais risquent d’être instrumentalisées. Car dialoguer dans les conditions imposées par la présidence, c’est valider l’idée que certaines voix sont inéligibles à la réconciliation. C’est travestir la médiation en participation. Elles deviennent alors caution morale d’un processus politique sélectif, mieux exclusif. Comme qui dirait : « venez nombreux, mais pas tous. Car, la recette voudrait un huis clos pour éviter les échos »
Et pourtant, le pays a besoin d’un vrai dialogue. Pas pour des postes ou un partage de pouvoir – mais pour la vérité, la justice, l’avenir commun, car tous les indicateurs sont au rouge. À quoi bon gouverner seul si la nation se fracture chaque jour en silence ? À quoi bon contrôler les institutions si les cœurs et les esprits se ferment ?
Fatshi, un président sûr de lui, mais seul
Félix Tshisekedi est un président réélu, mais pas réconcilié avec tous. Il gouverne, mais n’écoute qu’un cercle réduit. Il agit, mais dans la solitude d’une Union sacrée devenue un labyrinthe d’ambitions. Alors il redoute un dialogue qui lui échapperait. Il préfère le contenir, l’assécher, le réduire à un cadre utile à ses intérêts. C’est une stratégie. Mais c’est aussi un aveu de faiblesse.
Car un pouvoir fort n’a pas peur du désaccord, il l’affronte. Un président confiant n’écarte pas les voix critiques, il les défie dans la lumière. Refuser le vrai dialogue, c’est ouvrir un autre : celui de la rue, du silence tendu, de la colère sans micro.
La RDC mérite mieux que des calculs
La crise de confiance en RDC ne se réglera pas par des arrangements de salon. Elle exige un acte politique fort, courageux : regarder dans les yeux ceux qu’on exclut, écouter même les outrances, et chercher une issue ensemble. Cela s’appelle gouverner. Cela s’appelle aimer son pays plus que son pouvoir.
L’Église a lancé l’idée. Le peuple en ressent le besoin. Le président, lui, tergiverse, filtre, contrôle.
Mais qu’il se souvienne : un dialogue qu’on bride finit toujours par revenir, ailleurs et plus fort – souvent trop tard.