Dans une anecdote invraisemblable qui date des années mobutiennes laisse souvent entendre que chaque fois que le Maréchal du Zaïre se trouvait coincé par des questions indésirables, il faisait appel à un de ses collaborateurs proches pour trouver « une contre-vérité ». En termes clairs, il s’agit carrément de mentir ses interlocuteurs étrangers, surtout les journalistes.
Souvent dans ces contextes, apprend-t-on, deux noms célèbres sont souvent cités, vrai ou faux. Personne ne sait nous le dire. Il s’agit de Boboliko Lokonga, son ancien ministre des Affaires Etrangères ou de Kengo wa Dondo Léon, son ancien Premier-ministre.
Avec toute l’autorité de fauve qu’on lui reconnaissait, le grand Léopard pouvait facilement interrompre sa conversation pour faire intervenir un de deux ci-haut cités en leur disant en linganla [Une des langues nationales qu’il aimait bien parler] : « Boboliho ou Kengo bwaka bango lukuta » [ça signifie en français, Boboliko ou Kengo trompe-les]. Ainsi, le collaborateur en question devrait absolument remuer sa méninge pour trouver une réponse à la question embarrassante afin de convaincre l’interlocuteur du chef. Une fois satisfait, tout en secouant la tête, il ajoutait : « Matabisi na mboka » [qui veut dire, tu auras ton cadeau ou ta prime au pays].
Un récit que personne de l’entourage du feu Président de la République du Zaïre ou un des officiels de l’époque n’a jamais pu authentifier ou démenti, ni moins encore situer le lieu et la circonstance. Néanmoins, tout le monde en parle et pense que c’est vrai. Cela fait quand même rire, pourtant, ce n’est loin d’une honte, de l’opprobre pour toute la nation que d’avoir un chef menteur.
Ce genre de dérapage, pour ne pas dire de monstruosité pourrait être qualifié de « mensonge d’Etat ». Car, venant de la bouche du père de la nation. Lui le garant de tout un pays, voire garant du mensonge qu’il peut débiter du haut d’une quelconque tribune à l’étranger pour donner une belle image de son pays, ou mieux disons de sa gestion. N’est-ce pas ridicule ? Plus ridicule quand le mensonge sort directement des paroles de celui qui les prononce au nom de son pays. Malheureusement, ça se passe seulement en Afrique.
Si l’anecdote du Maréchal faisait et continue à faire rire en référence chaque fois que l’on s’en souvienne du mensonge d’un homme politique, cela prend du moins un caractère comique. Mais lorsque des assertions contraires à la vérité sont sciemment prononcées, ça s’appelle chez les Africains « la sorcellerie ». Mentir à l’âge du numérique où les réseaux sociaux véhiculent faits et paroles à la vitesse supersonique, c’est se tirer dans la tête, surtout quand on est dirigeant.
Il semble en Afrique, beaucoup de nos chefs d’Etat sont encore dans cette posture de mentir, surtout quand ils sont en dehors de leurs pays. C’est pour eux une façon de s’attirer sympathie ou soutien des partenaires bilatéraux ou multilatéraux. C’est tout de même une honte qui couvre tous ceux au nom de qui le mensonge est débité dans l’opinion internationale.
La vérité, elle est têtue et finit par rattraper le mensonge quelle que soit son allure de course.
Le Fédéral
